La ministre wallonne de l’Environnement, Céline Tellier (Écolo), était attendue de pied ferme par les agriculteurs au niveau du blocage autoroutier de l’échangeur de Daussoulx ce lundi, dans le JT du soir de la RTBF. L’ambiance était électrique : jets de pétards, projectiles et climat hostile. La journaliste Nathalie Maleux a dû écourter son direct. La ministre a ensuite été poursuivie jusqu’à son véhicule, accompagnée d’un lynchage de noms d’oiseaux. Alors qu’en France, des vignerons de l’Aude invitent Sandrine Rousseau à retourner « faire sa soupe », Céline Tellier est invitée à retourner « dans son potager ». Déjà fragilisée dans le dossier des eaux contaminées aux PFAS, est en mauvaise posture. Le monde agricole demande sa démission : « Le gros problème, ce sont les Verts ».
La colère se répand comme une trainée de poudre. Depuis dix-huit mois, pas moins de 16 pays européens, des Pays-Bas à la Roumanie en passant par la Pologne, l’Allemagne, la France et la Belgique, ont été embrasés par des mobilisations.
Un retournement idéologique
Les agriculteurs ne décolèrent pas. Ils réclament des mesures concrètes par rapport à des enjeux européens de libre-échange et de mise en concurrence déloyale avec une agriculture moins respectueuse de l’environnement. Parmi les problèmes relevés, il y a la question du revenu, les importations de produits issus de pays où les normes de production ne sont pas les mêmes, les difficultés administratives et le difficile équilibre entre les normes environnementales et le travail agricole.
« Le gros problème, ce sont les Verts. Comment a-t-on pu leur confier le ministère de l’agriculture ? Ces gens-là ne connaissent rien à nos problèmes. Avec les sociaux-démocrates [le parti d’Olaf Scholz] ou les libéraux [celui du ministre des Finances, Christian Lindner], on peut ne pas être d’accord, mais au moins on discute. Avec les Verts, c’est impossible, on a affaire à des idéologues totalement coupés de la réalité », dézingue cet agriculteur allemand dans Le Monde.
Un Green Deal plutôt noir …
L’ADN des écolos est pour le moins en mauvaise santé à quelques mois des élections européennes. Ce jeudi 1er février, se tiendra un Sommet européen, à Bruxelles. Les agriculteurs, dont certains sont déjà présents dans le quartier européen, comptent bien s’y faire entendre.
L’UE est, par le biais de la politique agricole commune, responsable de plus de 50% du revenu des agriculteurs du continent. Or la nouvelle PAC impose de nouvelles règlementation pour protéger l’environnement et diminue drastiquement les aides directes. L’Europe avait fait le pari que les consommateurs accepteraient de payer davantage pour manger mieux. C’est l’inverse qui se pass, comme la crise de la filière bio le montre. Avec l’inflation et des salaires trop bas, les Européens préfèrent se nourrir mal, mais à bas coût. À cela, il faut ajouter une politique commerciale de libre-échange et de concurrence déloyale qui ne sert pas les intérêts du secteur agricole.
Que compte faire le monde politique en réponse au mécontentement des agriculteurs ? Il serait peut-être enfin temps de prendre conscience du coût que fait peser la « transition écologique » sur les exploitants dont 25% vivent sous le seuil de pauvreté. Un agriculteur sur cinq est ainsi contraint d’exercer deux professions à la fois.