Ce jeudi, le Parlement fédéral a adopté, à une large majorité, la réforme du chômage portée par le ministre David Clarinval (MR). Ce texte, présenté comme l’un des piliers de la législature, vise à limiter la durée du chômage à deux ans pour les personnes aptes au travail. « Il ne s’agit plus d’une assurance passive, mais d’une assurance active, centrée sur le retour à l’emploi », a souligné le ministre, saluant un « vote historique ». L’idée de la majorité Arizona étant d’atteindre un taux d’emploi de 80 % d’ici la fin de sa législature.
Une situation toujours critique
La réforme, débattue depuis plusieurs mois, a provoqué de vives tensions : les syndicats et de nombreuses associations ont dénoncé un risque de précarisation accrue, notamment pour les publics plus âgés ou fragilisés. Les partisans du texte, eux, insistent sur la nécessité de rendre le système plus incitatif et soutenable. Selon les chiffres de l’ONEM en janvier 2025, la Belgique compte 287.919 chômeurs complets indemnisés demandeurs d'emploi (CCI-DE). La répartition par durée de chômage est la suivante :
Moins d’un an : 37,9 %
Entre 1 et moins de 2 ans : 17,6 %
2 ans et plus (très longue durée) : 44,4 %
Ce dernier groupe, soit 127.888 personnes, est au cœur de la réforme : il s’agit du stock maximal de chômeurs de très longue durée potentiellement concernés par la nouvelle limite de deux ans de droit au chômage. Les estimations du nombre d’exclusions dans les trois années à venir varient d’ailleurs largement : 100.000, selon le ministre Clarinval, à 174.000 d’après le syndicat CSC. Ces chiffres ne représentent cependant pas le flux annuel d’exclusions, mais bien le stock étalé dans le temps, en l’absence de réinsertion ou de dérogation.
À noter aussi : les 45-65 ans sont particulièrement concernés, car ils constitueraient près de 40 % des futurs exclus du chômage, selon plusieurs projections.
Un système repensé et des droits adaptés
La réforme introduit une dégressivité progressive des allocations :
- 3 premiers mois : 65 % de la rémunération journalière moyenne.
- 4e à 6e mois : 60 % de la rémunération journalière moyenne.
- 7e à 12e mois : 60 % de la rémunération, mais avec abaissement du plafond.
Deuxième année : versement d’un montant forfaitaire adapté à la situation personnelle (familiale) du demandeur.
Parmi les autres mesures
Un droit au rebond : chaque chômeur bénéficie une fois dans sa carrière d’un droit à 6 mois d’allocations s’il démissionne.
Les allocations d’insertion pour jeunes diplômés sont désormais limitées à 1 an (contre 3 ans auparavant). En outre, la durée du stage d’insertion est réduite à 156 jours.
Modification de la définition de « l’emploi convenable » : obligation pour le chômeur d’accepter tout emploi proposant une rémunération supérieure ou égale à 90 % de celle de ses allocations des 6 premiers mois.
Réduire le chômage structurel
Pour Clarinval, il s’agit d’un « équilibre entre responsabilisation et solidarité ». Des exceptions à la durée maximale sont prévues pour les personnes en situation de handicap, les seniors ou les malades, pour qui l’indemnisation pourra être prolongée.
L’objectif est de dynamiser le marché de l’emploi et de réduire le chômage structurel, à l’heure où de nombreux secteurs peinent à recruter. Les oppositions promettent néanmoins une vigilance accrue concernant les effets concrets de la réforme, en particulier sur l’inclusion des publics les plus éloignés de l’emploi.
Avec ce vote, la Belgique entame une nouvelle étape dans sa politique de l’emploi, misant sur une logique d’activation et de responsabilisation, tout en gardant la porte ouverte à l’accompagnement des plus fragiles. L’enjeu : réconcilier efficacité économique et justice sociale.