Samedi, l’Amérique a renoué avec ses vieux démons. D’un océan à l’autre, la colère a grondé : à New York, Los Angeles, Chicago, des foules bigarrées ont envahi les rues, pancartes brandies, voix éraillées, pour crier haut et fort leur rejet de la politique de Donald Trump, revenu à la Maison-Blanche comme un boomerang lancé par l’Histoire. Le mot d’ordre ? « No Kings », pas de rois, pas de couronne pour un président qui se rêve monarque.
Dans l’air, un parfum de déjà-vu, mais aussi une énergie nouvelle. Les manifestants, jeunes et moins jeunes, progressistes, syndicalistes, étudiants, artistes, brandissaient des slogans cinglants : « Democracy, not dynasty », « Trump is not my king », ou encore « America, wake up! ». Les réseaux sociaux vibraient au rythme des vidéos de cortèges, de sit-ins, de happenings artistiques, tandis qu’au sol, la police encadrait, parfois bousculait, les plus téméraires.
Ironie du calendrier : pendant que la rue grondait, Donald Trump, lui, savourait les ors d’une parade militaire grandiose à Washington. Chars rutilants, drapeaux étoilés, discours martiaux : le président semblait savourer chaque minute, insensible à la tempête qui secouait les grandes villes. Un contraste saisissant, presque indécent, entre la solennité de la parade et la fièvre contestataire.
La crainte d’un glissement autoritaire
Dans les cortèges, la peur d’un glissement autoritaire se mêlait à la rage de voir la démocratie piétinée. « On n’a pas fait la révolution pour ça », lançait une manifestante, costume de Lady Liberty sur le dos, brandissant une pancarte « No Kings, No Tyrants ». À ses côtés, un vétéran du Vietnam, drapeau à la main, confiait : « J’ai combattu pour la liberté, pas pour un culte de la personnalité. »
La mobilisation, la plus massive depuis le retour de Trump au pouvoir, rappelle que l’Amérique n’a rien perdu de sa capacité à s’indigner. Mais la fracture demeure béante : pendant que la rue crie « No Kings », la Maison-Blanche, elle, semble avoir troqué la démocratie pour le spectacle. Reste à savoir qui, de la rue ou du trône, l’Histoire retiendra dans les prochains mois, voire, à tout le moins au plus tard à mi-mandat.