C’est un cri d’alarme qui résonne dans un silence assourdissant. Alors qu’en France, Emmanuel Macron promet, après le meurtre d’une surveillante de collège, une interdiction prochaine des réseaux sociaux pour les moins de 15 ans, le dernier rapport KidsRights 2025, publié ce 11 juin, dresse un constat glaçant : la santé mentale des enfants s’effondre, et les plateformes numériques en sont les principaux accélérateurs.
Des chiffres qui font froid dans le dos
Plus de 14% des jeunes âgés de 10 à 19 ans souffrent aujourd’hui de troubles mentaux. Chez les 15-19 ans, le taux de suicide atteint 6 pour 100.000. Ces chiffres, probablement sous-estimés selon KidsRights, témoignent d’une crise mondiale sans précédent. Entre 2018 et 2022, l’usage problématique des réseaux sociaux chez les 11-15 ans a bondi de 7 à 11% dans 44 pays, soit une augmentation de près de 60%. Derrière ces pourcentages, des vies brisées et des familles désemparées.
Les réseaux sociaux, accélérateurs de crise
Le rapport KidsRights pointe du doigt la « corrélation troublante » entre la détérioration de la santé mentale des enfants et l’utilisation compulsive des réseaux sociaux. Les plateformes, obsédées par l’engagement et le profit, laissent les enfants sombrer dans une dépendance numérique toxique, sans garde-fous sérieux. Isolement, anxiété, tentatives de suicide : les dégâts sont planétaires, du Canada à la Chine. Marc Dullaert, président de KidsRights, ne mâche pas ses mots : « La crise de la santé mentale de nos enfants a atteint un point de rupture, aggravée par la passivité des géants du numérique. »
Le rapport dénonce aussi la lenteur des réponses politiques. Les dispositifs techniques pour limiter l’accès existent, mais ils sont déjà obsolètes face à la ruse des adolescents et faciles à contourner grâce à la technique VPN. Pendant ce temps, les géants du web engrangent des profits colossaux et les États tergiversent.
Interdire, mais comment ?
KidsRights met en garde : interdire sans réflexion, c’est risquer de priver les enfants de leurs droits fondamentaux. Ce qui explique que, hors dictatures comme la Chine, aucun pays à Etat de droit robuste ne se soit lancé dans l’aventure. Parmi les Occidentaux, l’Australie fait exception, avec la limitation d’accès aux réseaux sociaux depuis fin 2024 pour les moins de seize ans.
Mais l’inaction serait pire encore. Il est urgent d’imposer des évaluations d’impact, de contraindre les plateformes à rendre des comptes, de former les professionnels de santé et d’éduquer massivement les jeunes à l’usage du numérique. « Il faut agir, et vite. Les enfants ne sont pas des cobayes pour les algorithmes des réseaux sociaux », martèle Marc Dullaert. Laisser la révolution digitale sans contrôle, c’est sacrifier une génération sur l’autel du profit. Le rapport KidsRights 2025 appelle à une mobilisation internationale et à placer la protection du bien-être des enfants au-dessus des intérêts économiques des géants du numérique.