En Argentine, le président Javier Milei poursuit sa « thérapie de choc » ultralibérale. Après avoir réduit drastiquement les dépenses publiques et lancé une vague de privatisations, il vient de signer un décret qui restreint significativement le droit de grève, tout en accélérant la libéralisation du système bancaire et financier.
Un droit de grève encadré
Le nouveau décret élargit la liste des secteurs considérés comme « essentiels » : l’éducation, le transport maritime et fluvial, les services portuaires et douaniers, ou encore les télécommunications rejoignent désormais les hôpitaux, l’énergie ou le contrôle aérien. Dans ces secteurs, toute grève devra désormais garantir un service minimum de 75%. D’autres activités comme le transport de personnes, la construction ou l’industrie alimentaire devront assurer 50% de leur fonctionnement en cas de mouvement social. Cette mesure, dénoncée par la puissante CGT comme une tentative de « supprimer le droit de grève d’un trait de plume », vise selon le gouvernement à empêcher que des professions stratégiques ne paralysent le pays.
Auparavant, le niveau de service minimum était négocié entre syndicats, entreprises et autorités. Désormais, il est imposé unilatéralement par l’exécutif, sans concertation préalable. Cette décision intervient alors que l’Argentine a connu trois grèves générales en moins de six mois contre la politique d’austérité et de dérégulation de Milei, et que la contestation sociale reste vive.
Banques : vers une dérégulation totale
Parallèlement, Milei a annoncé une série de mesures pour libéraliser encore davantage le secteur bancaire. L’objectif : convaincre les Argentins, échaudés par des décennies d’inflation et de crises bancaires, de rapatrier les quelque 200 milliards de dollars qu’ils conservent hors du circuit officiel. Désormais, les banques devront accepter des dépôts jusqu’à 100 millions de pesos (environ 90.000 dollars) sans exiger de justificatif sur la provenance des fonds et les dépenses par carte ne seront plus automatiquement transmises au fisc.
Le slogan du gouvernement, « tes dollars, ta décision », illustre la volonté d’assouplir les contrôles sur les mouvements d’argent, dans l’espoir d’assainir le système financier et d’attirer les capitaux informels. Ces mesures, qui entreront en vigueur le 1er juin prochain, seront complétées par une réforme fiscale. Elles s’inscrivent dans la lignée de la libéralisation partielle du peso et de la suppression progressive des contrôles de change, décidées en avril dernier.
Un pari risqué ?
Si Milei revendique une baisse spectaculaire de l’inflation et une chute de la corruption, le coût social est immense : la pauvreté touche désormais plus de 55% de la population, la récession s’installe, et le chômage progresse. Les syndicats dénoncent une attaque sans précédent contre les droits sociaux et les fondements démocratiques du pays. Mais le président, qui conserve un noyau de soutiens solides, reste inflexible et accélère son programme de dérégulation.
Pour rappel, Javier Milei a été élu président de l’Argentine en novembre 2023 avec 55,65% des voix. Selon l’Observatoire électoral argentin, en janvier 2025, il bénéficiait toujours du soutien de 55% des Argentins, soit un taux équivalent à son score du second tour de la présidentielle.