Le « premier centre d'excellence belge combinant l'intelligence artificielle et la cybersécurité », a été créée en mars 2022. Le but ? « Maîtriser ces deux domaines clés pour la société belge afin de relever les défis d'aujourd'hui et de demain ». L’entité est une filiale 100% Proximus. Le nom du centre rend hommage à Ada Lovelace, une mathématicienne et écrivaine anglaise de la première moitié du 19ème siècle, qui est considérée comme la première programmeuse informatique de l'Histoire. Trois ans plus tard très exactement, des questions se pose quant à l’efficience de cette initiative. Les résultats se font attendre, suscitant des interrogations plurielles.
Les objectifs annoncés
Les ambitions initiales de Proximus Ada : devenir un catalyseur d’innovation en Belgique. Installé au sein de BeCentral, un hub technologique situé à Bruxelles, avec un plan initial de recrutement de 150 spécialistes en trois ans, l’initiative promettait d’en faire un acteur central dans la modernisation des services numériques de Proximus et au-delà, pour partager expertises et solutions. Elle devait également renforcer la cybersécurité au niveau national, un enjeu crucial dans un contexte où les cybermenaces sont en constante augmentation. Le tout souligné par des collaborations avec MolenGeek, l’Ecole 19, des universités et des instituts de recherche. Bref, un champs d’action très vaste, puisque la data est aujourd’hui partout !
Dans les faits : un grand flou artistique
Seulement voilà, selon les rapports de gestion 2022 et 2023, les réalisations concrètes n'ont pas répondu aux attentes initiales, ce qui suscite des interrogations sur l'efficacité de la stratégie adoptée. Plusieurs experts estiment que les investissements réalisés n'ont pas généré de retour suffisamment significatifs, suggérant une allocation inefficace des ressources. De source sûre, en interne, plusieurs employés expriment également leur frustration face à une stratégie jugée trop ambitieuse, mais insuffisamment structurée, avec des objectifs flous et un manque de suivi rigoureux.
Des coûts indigestes
Toujours selon les rapports de gestion successifs que nous avons analysés, les dépenses liées à Proximus Ada sont également pointées du doigt. Dans un contexte où l’entreprise fait face à des difficultés financières, ces coûts sont perçus comme excessifs. Par ailleurs, les départs de cadres sont nombreux et les indemnités de rupture jugées abusives, ce qui accentue les critiques. Ces pratiques, combinées aux piètres résultats du projet démotivent les équipes en interne et rendent les investisseurs de plus en plus frileux.
Un manque d’anticipation
Un autre sujet de controverse concerne les Tours Proximus - connues sous le nom de Tour Belgacom jusqu’en 2014 - situés près de la Gare du Nord à Bruxelles. À la suite d’une décision de relocalisation, ces bâtiments demeurent aujourd’hui vacants. La difficulté à trouver des locataires ou des acquéreurs souligne une mauvaise anticipation des besoins immobiliers de l’entreprise. Bien qu'un permis d'urbanisme ait été accordé pour une reconversion mixte (bureaux, logements, chambres d'étudiants), l’avenir du projet demeure incertain. Et pour cause ! Les marges de rentabilité escomptées sont de plus en plus rognées. Cette situation de latence représente un coût supplémentaire pour Proximus, alors que l’entreprise cherche à réduire ses dépenses opérationnelles.
Si l’ambition derrière Proximus Ada était louable, force est de constater que c’est le grand écart entre la théorie et la pratique. Quant au groupe ? La dette nette de Proximus a atteint 4,547 milliards d'euros en septembre 2024, ce qui limite sa flexibilité financière. Avec une pénurie de talents spécialisés, une concurrence accrue, une perception mitigée par les consommateurs et un contexte économique marqué par une inflation persistante, le groupe suscite à tout le moins de nombreux questionnements. Affaire à suivre…