L'année 2024 marquera un tournant majeur dans la dynamique géopolitique et économique globale avec l'élargissement notable des BRICS. Passant de cinq à onze membres, l’alliance ne cesse de redéfinir les règles du jeu. Mais, la montée en puissance révolutionnaire de nations émergentes ne s’arrête pas là. Pour modeler un nouvel ordre mondial, une dédollarisation est à l’agenda promettant de (re)définir les échanges économiques internationaux. Pour l’heure, rien ne permet de préciser le support de la devise envisagée par le désormais grand rival du G7. Mais, cette transition, bien que complexe, pourrait diluer le monopole du dollar, encourageant une multipolarité monétaire et offrant aux pays une plus grande autonomie économique. Les répercussions seront vastes sur la scène internationale, affectant les investissements et le commerce.
Une conférence diplomatique élargie
L'acronyme BRICS désigne le rapprochement de quatre pays aux vastes territoires, à la population nombreuse et aux importantes ressources naturelles : le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine, auxquels s'est intégré l'Afrique du Sud en 2011. Depuis 2011, le groupe des BRICS a pris la forme d'une conférence diplomatique à part entière, donnant lieu à un sommet par an, se déroulant à tour de rôle dans chacun des cinq États. Le but de ces sommets est d'affirmer la place majeure de ces pays sur la scène internationale, et de mettre en scène leur poids économique et politique, en particulier au regard d'autres États ou groupes d'États comme les États-Unis ou l'Union européenne. Le 1er janvier 2024, le groupe doit s'élargir à six nouveaux membres, ce qui représente un basculement important dans son histoire : Arabie saoudite, Argentine, Égypte, Émirats arabes unis, Éthiopie, et Iran. Cela portera le nombre de membres de cinq à onze.
Les BRICS sont un amalgame d'intérêts stratégiques et économiques divers. Ils partagent une identité commune basée sur une définition par la négative : ils ne sont pas occidentaux. Les cinq BRICS de base représentent 42% de la population mondiale et plus de 23% du PIB mondial. Le groupe élargi représentera 46,5% de la population mondiale. En utilisant les données du PIB du FMI, on peut en déduire qu'il représentera environ 30% du PIB mondial.
A l'horizon de 5 ans, les BRICS devraient représenter 38,6% du PIB mondial en parité de pouvoir d'achat, alors que le G7 connaîtra une baisse à 28%.
Le monopole du dollar en question
L’expansion des BRICS renverse le monopole du dollar sur le marché pétrolier. Avec six grands producteurs de pétrole, à savoir l'Arabie saoudite, la Russie, l'Iran, les Émirats arabes unis, la Chine et le Brésil, et deux grands consommateurs, la Chine et l'Inde, les BRICS couvriront, à partir de 2024, une grande part du marché mondial, remplaçant le dollar américain par des monnaies nationales dans les échanges commerciaux. La perte du principal marché mondial du dollar pourrait non seulement réduire sa domination, mais aussi porter un coup dur à l'économie américaine elle-même.
Premièrement, cela réduirait le contrôle américain sur les marchés des pays concurrents, dont la vulnérabilité aux actions de Washington résulte en partie de l’utilisation du dollar. Deuxièmement, cela augmentera l’inflation de la monnaie américaine, actuellement contenue aux dépens des utilisateurs dans la majeure partie du monde.
Le projet d'une monnaie commune
L’initiative vise non seulement à s'affranchir de la dépendance au dollar, mais aussi à offrir aux marchés émergents une certaine protection contre les fluctuations et les politiques monétaires extérieures. Une telle monnaie pourrait catalyser un changement radical, influençant la dynamique des investissements et la confiance dans les marchés des BRICS. Ce qu’on ne sait pas encore, c’est la forme, ou le support qui sera priorisé(e) pour soutenir la monnaie envisagée par les BRICS. Mais deux solutions semblent se dessiner comme les options les plus probables. Il s’agit notamment de l’or et de la crypto.
Une nouvelle hégémonie ?
En matière de production de métaux essentiels aux technologies de pointe, les BRICS sont en tête. Ils représentent, 79% de la production d'aluminium, tandis que le G7 ne contribue qu'à hauteur de 1,3%. De même, ils détiennent une part dominante de 77% de la production mondiale de palladium, alors que le G7 ne produit que 6,9% de cette ressource cruciale. Ce groupe détient aussi 44,35% des réserves pétrolières mondiales.
Les BRICS ne sont pas seulement puissants sur le plan économique. Ils jouent également un rôle significatif dans la production alimentaire mondiale. En 2021, ces pays ont représenté 49% de la récolte mondiale de blé contre seulement 19,1% pour le G7 et 55% de la production mondiale de riz, comparé à 2,6% pour les pays du G7.
A la lumière de ces chiffres écrasant, chercheurs et analystes explorent la capacité des BRICS à remettre en question l'historique hégémonie occidentale. Les récents développements, y compris l'élargissement et l'initiative de dédollarisation, ajoutent une nouvelle profondeur aux questionnements relatifs au pouvoir d’influence de ce bloc.